Les femmes peintres oubliées du XVIIème siècle à Anvers
Dans l’ombre des grands maîtres flamands comme Rubens et Van Dyck, de nombreuses femmes artistes ont marqué la scène artistique anversoise du XVIIème siècle. Leur talent, longtemps négligé par l’histoire de l’art, mérite aujourd’hui d’être redécouvert et célébré.
Catharina van Hemessen (1528-1587) : Une pionnière oubliée
Bien que sa carrière ait débuté à la fin du XVIème siècle, l’influence de Catharina van Hemessen s’est prolongée jusqu’au XVIIème siècle. Première femme artiste connue des Pays-Bas méridionaux à avoir signé et daté ses œuvres, elle est particulièrement célèbre pour son autoportrait de 1548, considéré comme le premier autoportrait d’un artiste à son chevalet dans l’histoire de l’art occidental.
Clara Peeters : La maîtresse des natures mortes
Clara Peeters représente l’une des figures les plus fascinantes de l’art anversois du XVIIème siècle. Spécialisée dans les natures mortes, elle a développé une technique exceptionnelle dans la représentation des reflets sur les surfaces métalliques et la texture des aliments. Ses œuvres, caractérisées par une précision quasi photographique, témoignent d’une maîtrise technique impressionnante.
Active entre 1607 et 1621, elle est l’une des rares femmes artistes de son époque à avoir pu vivre de son art. Ses natures mortes, particulièrement appréciées par la bourgeoisie marchande d’Anvers, reflètent la prospérité économique et le raffinement de la ville au XVIIème siècle.
Michaelina Wautier : Le génie méconnu
Redécouverte récemment, Michaelina Wautier (1604-1689) se distingue par la diversité de sa production artistique. Contrairement à la plupart des femmes peintres de son époque, cantonnées aux portraits et natures mortes, elle s’est aventurée dans la peinture d’histoire et les scènes mythologiques, genres traditionnellement réservés aux hommes.
Son chef-d’œuvre, “Le Triomphe de Bacchus” (1659), témoigne de sa maîtrise exceptionnelle de la composition et de l’anatomie. La qualité de son travail égale celle de ses contemporains masculins les plus célèbres, pourtant son nom est resté dans l’ombre pendant des siècles.
Les obstacles et défis
Ces femmes artistes devaient surmonter de nombreux obstacles pour exercer leur art. L’accès aux formations artistiques leur était souvent refusé, et elles ne pouvaient pas étudier le nu, considéré comme indécent pour une femme. Beaucoup d’entre elles ont pu développer leur talent grâce à l’enseignement de leur père ou de leur mari, eux-mêmes artistes.
L’héritage culturel
Ces artistes ont contribué à façonner l’identité culturelle d’Anvers au XVIIème siècle. Leurs œuvres témoignent non seulement de leur talent artistique, mais aussi de la vie quotidienne, des goûts et des aspirations de la société anversoise de l’époque. La redécouverte de ces artistes permet aujourd’hui de réécrire une page importante de l’histoire de l’art, trop longtemps dominée par une perspective masculine.
Influence sur l’art contemporain
L’héritage de ces femmes peintres continue d’inspirer les artistes contemporains. Leur persévérance face aux obstacles sociaux et leur détermination à exercer leur art malgré les contraintes de leur époque résonnent particulièrement avec les préoccupations actuelles concernant la place des femmes dans le monde de l’art.
Sources :
- De Clippel, K. “The Rediscovery of Michaelina Wautier” – Lien
- Musée Royal des Beaux-Arts d’Anvers, “Femmes artistes à Anvers” – Lien
- Van der Stighelen, K. “Women Artists in the Early Modern Low Countries” – Lien
- Honig, E. “The Art of Being “Artistic”: Dutch Women’s Creative Practices in the 17th Century” – Lien