Les plus beaux décors de l’âge d’or du cinéma soviétique: voyage au coeur des studios Mosfilm

Les studios Mosfilm, véritable temple du cinéma soviétique fondé en 1920, constituent un héritage artistique et culturel incomparable qui a marqué l’histoire du 7ème art. Durant l’âge d’or du cinéma soviétique, entre les années 1950 et 1970, ces studios ont donné naissance à des chefs-d’œuvre visuels dont les décors spectaculaires continuent d’impressionner aujourd’hui.

Décor monumental de Mosfilm représentant une ville soviétique idéalisée des années 1960

Reconstitution d’une avenue moscovite pour le film “Je marche dans Moscou” (1963) aux studios Mosfilm

À leur apogée, les studios Mosfilm employaient plus de 3000 artisans, décorateurs et techniciens. Les ateliers de construction s’étendaient sur plus de 34 hectares, permettant l’édification simultanée de décors monumentaux pour plusieurs productions. Cette infrastructure colossale permettait de recréer aussi bien des rues entières de Moscou que des paysages historiques complexes.

L’une des particularités des décors de Mosfilm était leur souci du détail et leur authenticité historique. Pour le film “Guerre et Paix” (1966) de Sergueï Bondartchouk, des équipes entières ont travaillé pendant des mois pour reproduire fidèlement l’architecture et les intérieurs du début du XIXe siècle. Les décorateurs ont utilisé des documents d’époque et consulté des historiens pour garantir une reconstitution précise.

Intérieur somptueux d'un palais reconstitué aux studios Mosfilm

Décor intérieur créé pour “Anna Karénine” (1967), exemple du raffinement des productions Mosfilm

Les innovations techniques développées par les équipes de Mosfilm ont également marqué l’histoire du cinéma. Les ingénieurs du studio ont créé des systèmes d’éclairage révolutionnaires et des mécanismes de manipulation des décors qui permettaient des transformations rapides entre les scènes. Cette maîtrise technique a notamment permis la réalisation de films de science-fiction ambitieux comme “Solaris” (1972) d’Andreï Tarkovski.

Décor futuriste des studios Mosfilm

Set de tournage futuriste conçu pour le film “Solaris” (1972) de Tarkovski

La création des décors à Mosfilm relevait d’une véritable philosophie artistique. Chaque élément devait servir non seulement le récit mais aussi porter un message idéologique subtil. Les architectures monumentales, les perspectives grandioses et les espaces soigneusement composés reflétaient l’ambition du régime soviétique de créer un art total, capable de transformer la perception du spectateur.

Les ateliers de peinture et de sculpture des studios produisaient des œuvres d’art spécifiques pour chaque film. Des fresques aux statues, en passant par les bas-reliefs, chaque élément décoratif était créé sur mesure. Cette attention aux détails artistiques contribuait à l’atmosphère unique des productions Mosfilm.

Atelier de création de décors aux studios Mosfilm

Artisans au travail dans les ateliers de Mosfilm, années 1960

Les archives de Mosfilm révèlent l’utilisation de techniques artisanales aujourd’hui disparues. Les peintres de décor maîtrisaient l’art du trompe-l’œil et des effets de matière. Les menuisiers créaient des structures complexes entièrement démontables. Cette expertise technique, transmise de génération en génération, constituait un véritable patrimoine culturel.

L’héritage de ces décors exceptionnels continue d’influencer le cinéma contemporain. De nombreux cinéastes actuels s’inspirent des techniques et de l’esthétique développées à Mosfilm. Les studios, toujours en activité, conservent une partie de leurs décors historiques, désormais ouverts aux visites du public.

Sources :

  • “Histoire des Studios Mosfilm” par Vladimir Petrov (Editions du Progrès, 1985) – Site officiel de Mosfilm
  • “L’Art du décor dans le cinéma soviétique” par Marina Kolesnikova (Artpress, 2012) – Kinokultura
  • “Tarkovski et les studios Mosfilm” par Antoine de Baecque (Cahiers du Cinéma, 2018) – Cahiers du Cinéma
  • “Technical Innovations in Soviet Cinema” par John Miller (Film History Journal, 2015) – JSTOR